mardi 23 décembre 2014


Merci d'être aussi nombreux à visiter ce blog qui ne parle que des livres lus. Je vous souhaite à vous qui partagez ma passion de joyeuses fêtes de fin d'année, de parcourir souvent ces librairies qui sentent bon le papier et l'encre fraîche et qui ont tendance à disparaître pour laisser place à des géants de la vente par correspondance. Dommage, rien ne remplacera jamais le plaisir de choisir, d'hésiter, de reposer, de sentir et puis finalement d'acheter celui qui vous procurera de merveilleux moments, de l'émotion, des larmes, du rire, des sourires, des soupirs, refermer un roman, le caresser parce que nous sommes tristes de le quitter, le prêter, le ranger, le ressortir un jour ou peut être jamais. J'ai prêté des livres jamais rendus mais ce n'est pas très grave, des livres voyageurs, ils continuent sans doute à procurer du bonheur à d'autres lecteurs. 

Je vais avoir deux livres en cadeaux de Noël, rien ne me fait plus plaisir "Constellation" et "Les mots qu'on ne me dit pas", j'ai choisi, pas de surprise mais j'aime mieux.



En attendant, j'ai lu cette semaine "Un si beau jour" de Elin Hilderbrand, une américaine qui habite à Nantucket, cette île prisée par les classes moyennes mais qui ont des ressources financières qui leur permettent d'avoir une résidence d'été sur l'île. Si vous vous rappelez du merveilleux film "Un été 42" vous avez vu les paysages de Nantucket.
L'histoire du roman se déroule sur l'île à l'occasion du mariage d'une fille Jenna, fille d'un riche avocat, Douglas.
362 pages que j'ai lues avec plaisir, c'est léger, vous pouvez poser le bouquin et le reprendre le jour d'après, vous n'aurez pas de problème pour suivre le cours de l'histoire.
Beth la maman de Jenna est morte depuis 7 ans d'un cancer des ovaires mais avant de partir elle a écrit un journal où elle organise le mariage de sa fille, sa présence est palpable et pas du goût de la deuxième femme du papa de Jenna, Pauline, elle est jalouse et triste, Douglas ne l'aime plus, il veut divorcer, il aime toujours Beth qui est partie, il ne peut pas la remplacer, il n'est pas heureux.
Ce mariage est la révélation des différents sentiments qui agitent les membres de la famille. Les échecs, la fidélité, l'amour éternel, tout est décrit, ils sont là, réunis pour fêter l'événement et rien ne se passera comme prévu mais tout finira bien. Est-ce que les choix étaient bons? Est-ce qu'un mariage peut durer toute une vie? Ont-ils toujours été honnêtes envers eux-mêmes et les autres? Fidèles à leurs promesses? Ce sera le moment des bilans.
Beth était une mère parfaite, ses filles voudraient lui ressembler, mais Margot est déjà divorcée et Jenna aspire à l'absolu, ce n'est pas évident.
J'ai bien aimé la dernière phrase du journal de Beth :
"Douglas Carmichael, qui m'a entourée pendant trente-cinq années d'une dévotion et d'une gentillesse infinies. Chaque jour de notre mariage, il a fait deux choses essentielles : il m'a fait rire et il a été mon ami"
"Comme j'ai été chanceuse".
Je suis d'accord, ce sont deux choses essentielles. Savoir que l'on peut tout confier à son conjoint comme à un meilleur ami est important, nous savons que nous ne serons jamais trahis, et qu'il nous fasse rire est vraiment essentiel, pour moi dans tous les cas.

Ce livre n'est pas en poche, il a été édité en juin 2014. Si vous avez l'occasion de le lire, pourquoi pas? C'est juste un bon moment sans de grandes émotions.
Bye MClaire.


jeudi 11 décembre 2014

"Madame Diogène" d'Aurélien Delsaux et "Juste avant le bonheur" d'Agnès Ledig.


Deux livres depuis ma dernière gazette, deux livres complètement différents, ils parlent tous les deux de solitude, solitude d'une vieille femme, solitude d'une jeune femme qui a eu un petit garçon à l'âge de seize ans et qui doit assumer sa situation toute seule.



J'étais prévenue, ce livre est étrange, c'est Michelle qui l'a acheté. 
En le commençant je me demandais où je posais mes yeux, sur l'infâme, la description d'un terrier où grouille les bestioles, la crasse, la pire des solitudes, celle d'une vieille femme qui sombre lentement dans la folie, elle ne sort plus, se terre avec tous ses détritus, ne veut plus recevoir personne, elle a peur de ceux qui viendraient la chercher. Rien de réjouissant dans les premières pages, pourtant j'étais prise dans la lecture et je tournais les pages sans avoir envie de m'arrêter, 137 pages vite lues.
Nous voyons fréquemment des images à la télé, un appartement envahi par des sacs poubelles, un vieillard et quelquefois même pas, un homme ou une femme dans la force de l'âge qui vivent là dans une odeur nauséabonde, sans aucune hygiène.
Ce n'est pas rare.
Ce livre est un huis-clos, une femme et sa folie, l'exclusion à la fin de leur vie de nombreux vieillards qui ne parlent plus à personne et qui perdent même l'usage de la parole, à un moment du livre elle dit "pa-pa" le seul mot prononcé. Elle a des flashs de vie heureuse à la campagne, de ruisseaux qui cours, de prairies, des grands platanes aux formes d'homme aux bras levés, la première étoile, le vent...Georges, ce Georges qui est en photo, une photo qu'elle lèche, qui était Georges?
De sa fenêtre elle observe le monde, le boulevard, les gens qui se pressent, un monde qui continue à vivre mais sans elle.
Le vocabulaire de l'auteur est si précis et tellement imagé, je sentais les remugles, je me grattais à la description des bestioles, mais je lisais, je n'avais pas envie de refermer le bouquin, je voulais connaître la fin, une fin un peu plate, attendue.
C'est un roman sur l'exclusion, sur notre société, ce monde si indifférent aux autres, un monde de plus en plus violent. Cette femme pourrait être une voisine dans un immeuble.

L'auteur a du talent, c'est son premier roman, je ne peux pas vous le conseiller, vous faites comme bon vous semble. Il vient de paraître. J'espère que le prochain sera plus gai et qu'il y aura un peu plus d'action. Il est, disons, très intéressant.


J'avais lu celui-ci avant "Madame Diogène", prêté par Claudette, complètement différent mais qui traite aussi de la solitude d'une jeune fille de 20 ans maman d'un petit garçon de trois ans, enceinte après une fête bien arrosée, elle avait 16 ans. Elle met son petit garçon au monde, a son bac et arrête ses études pour travailler comme caissière dans une grande surface, un travail indispensable pour assumer leurs vies. Ses parents ne l'aident pas, la mère est alcoolique, le père assez violent. Cela doit arriver dans la vraie vie.
Julie a perdu l'insouciance de sa jeunesse, elle compte chaque euro, se prive de tout mais il y a Lulu.
Julie qui a 20 ans ne croit plus aux contes de fée depuis longtemps, son seul bonheur, retrouver son petit garçon, Ludovic, qui ne sait pas dire les R lorsqu'il parle, il est attendrissant, raisonnable comme le sont souvent les enfants qui devinent la détresse d'une maman. Ils vivent en tête à tête.
Elle a un patron qui est un vrai "connard" qui la harcèle, jusqu'au jour où Paul un homme qui pourrait être largement son père se présente à sa caisse, Paul sera celui qui fera basculer sa vie sans jamais rien lui demander en retour, il veut juste qu'elle soit heureuse, elle le touche. Elle a trois semaines de vacances, il l'amènera en Bretagne avec Lulu et son propre fils médecin qui a besoin de se reposer, de se retrouver.
Des rencontres, ce livre est fait de rencontres. Ce n'est pas du tout un roman à l'eau de rose, j'ai beaucoup pleuré en lisant, il arrivera le pire à Julie, mais aussi le meilleur à la fin, il y aura Romain le kiné qui saura soulager sa douleur.

C'est un roman sur le bonheur de vivre ensemble, sans égoïsme, tous les personnages sont des écorchés vifs qui en se retrouvant parviennent à être heureux, loin d'un monde fait d'individualités, d'agressivité. C'est un livre sur la coalescence, la reconstruction.
Une phrase :
" "Ne baisse pas les bras, tu risquerais de le faire deux secondes avant le miracle".

C'est un livre plein d'espoir que je vous recommande, il est en poche. N'oubliez pas la boîte de kleenex.

L'auteure Agnés Ledig est sage-femme, elle a perdu son petit garçon atteint d'une leucémie, c'est sans doute la raison qui rend son écriture si touchante, elle connaît toutes les émotions d'une maman qui perd son enfant, la colère, le chagrin qui fait hurler, et puis l'acceptation.
J'avais lu écrit par elle "Marie d'en haut" j'avais beaucoup aimé.




lundi 1 décembre 2014

"Charlotte"D.Foenkinos - "Le jour où j'ai appris à vivre" L.Gounelle.



J'avais des hésitations à la publication de "Charlotte", est-ce que j'allais aimer ce livre si différent de ceux qu'il avait écrits avant, des romans légers que je pouvais lire presque d'une traite parce que l'histoire m'intéressait, m'amusait, il est même arrivé qu'un roman devienne un film "La délicatesse".
"Charlotte" est complètement différent, plus profond, plus pensé et je l'ai aussi lu d'une traite, il est écrit comme un poème, une phrase, une ligne. J'ai souvent dit que j'adorais Augustin Trapenard et bizarrement en le commençant j'entendais la voix d'Augustin qui lisait, ça lui irait très bien, il pourrait le lire pour les non-voyants, ce serait un régal, Augustin traduit tellement bien les émotions.

Un auteur ne peut pas être un grand écrivain en écrivant des choses légères, ça n'existe pas, même si des milliers de gens le lisent, il faut écrire du Zola, du sérieux pour passer à la postérité.
Je soupçonne D.Foenkinos d'avoir voulu écrire un livre qui marque, celui que tous les écrivains portent en eux, il devait se sentir frustré de n'écrire que des choses légères, il était certainement persuadé de pouvoir faire beaucoup mieux et il y est arrivé. Je ne dis pas que tout est parfait, la Shoah a sans doute été beaucoup mieux décrite, il y a certainement des passages maladroits, mais le plaisir de la lecture est là, ce n'est pas la Shoah qui est au centre du livre, c'est la vie de Charlotte Salomon, ce peintre méconnu que D.Foenkinos a découvert et qui est morte très jeune, enceinte dans un camp de concentration.
Deux prix pour ce roman, le Renaudot et le Goncourt des lycéens, ces jeunes qui se trompent rarement en décernant leur prix.

L'histoire vraie de Charlotte :

Charlotte Salomon est née dans une famille juive en 1917, une famille touchée par des drames, du côté maternel beaucoup de suicides, de folie, sa mère se jette par la fenêtre lorsqu'elle est enfant, on lui cache la vérité, ses grands-parents s'occupent d'elle, son père un médecin brillant se consacre à l'hôpital et voit très peu sa fille, jusqu'au jour où il rencontre une cantatrice célèbre avec laquelle il se marie, Charlotte rejoint le domicile paternel. 
Ses grands-parents sentant la montée du nazisme se réfugient sur la Côte d'Azur, ils sont hébergés par une amie, ils insistent pour que Charlotte se joigne à eux, là où provisoirement règne la sécurité.
Il n'y a pas que des drames dans la vie de Charlotte, il y aussi d'heureuses rencontres, des sentiments amoureux, des amitiés, mais il y a l'humiliation, les interdictions de fréquenter certains endroits, elle est élève aux Beaux-Arts grâce à une connaissance qui ayant deviné son grand talent fait tout pour qu'elle soit l'unique juive à pouvoir apprendre dans cette institution. Il lui sera impossible de recevoir le prix qui récompense la plus belle oeuvre, son amie ira le chercher à sa place, elle ne pourra pas supporter cet affront et quittera les Beaux-Arts.
Et il y aura l'errance après "la nuit de Cristal" du 9 au 10 novembre 1938, jusqu'au dénouement fatal, vous lirez la suite....

Tout au long du roman, Charlotte essaie de survivre malgré la folie qui peut s'emparer d'elle, en peignant, en dessinant la vie de sa famille, pour laisser des traces de son passage, En luttant contre le mal étrange qui règne dans cette famille, la solution fatale. Elle veut donner la vie, penser qu'elle peut avoir une vie heureuse, avec un homme et un entant.

J'ai adoré ce livre, j'ai étouffé un sanglot à la fin, déportée après une dénonciation alors qu'elle était enceinte de 5 mois :

"Sur le bâtiment, on peut lire qu'on va prendre une douche,
Avant de pénétrer dans les bains, chacune se déshabille.
Il faut mettre ses vêtements sur un crochet.
Une gardienne s'époumone.
Surtout, retenez bien le numéro de votre porte-manteau
Les femmes mémorisent ce chiffre ultime
Et entrent dans l'immense salle.
Certaines se tiennent la main.
On ferme alors les portes à double tour, comme dans une prison.

La nudité sous une lumière glacée creuse les corps.
On remarque Charlotte avec son ventre.
Au milieu des autres elle ne bouge pas.
Elle semble s'extraire du moment.

Pour être là." :

Un autre roman lu cette semaine, il est épais mais il est écrit assez gros et il se lit très vite, il vient de sortir, je l'ai acheté parce que j'aime beaucoup Laurent Gounelle, il est spécialiste des sciences humaines, adore la philosophie et la psychologie, ses livres sont à chaque fois des vraies leçons de vie.






Il faut lire ce roman, si vous avez besoin de zénitude, de réfléchir sur notre société, d'apprendre à être bon, ne serait-ce qu'en offrant un sourire à l'autre, à rendre les autres meilleurs avec des actes de tous les jours.

Jonathan habite à San-Francisco, il rencontre une bohémienne qui lui prend la main et lui dit "Tu vas mourir". Sa vie prendra un autre sens, aidé par sa tante Margie qui lui tracera un chemin loin de son obsession, être le meilleur en faisant signer des contrats d'assurance, au point d'avoir perdu sa femme qui se sépare de lui en amenant leur petite fille.
Evidemment, il ne mourra pas mais il vivra autrement.
J'ai bien aimé les différents personnages de ce roman, Ryan est celui qui filme et écoute les gens de son quartier à leur insu et fabrique des vidéos qu'il balance sur internet, ça doit exister. Michael est détestable. La petite fille est adorable.

J'ai appris que nous avons trois cerveaux, un cerveau archaïque, un cerveau limbique et le néo-cortex siège du mental. Ne pas se laisser prendre aux pièges de notre vie moderne, internet, les flots d'e-mails, les SMS, les jeux vidéo, tout ça est utile mais ils finissent par induire en nous des émotions dont nous ne pouvons plus nous passer. C'est vrai.....Il m'arrive très souvent au moment de m'endormir de penser que nous sommes devenus accrocs à toutes ces nouvelles technologies et qu'il faudrait que pendant une journée je fasse un break, pas d'internet, pas de Facebook, pas de blogs, pas de télé, rien, comme avant, et je ne tiens pas ma promesse.

La vie intérieure, nous avons tous une vie intérieure, il faut la chercher, se connaître mieux pour pouvoir aimer les autres. C'est le sujet du roman. Depuis que je l'ai lu je dis à Christian "Attends, je vais te répondre, j'ai une vie intérieure" je ris mais en même temps je réfléchis.

En le lisant je pensais aux petits sourires que nous faisons quelquefois à celui ou à celle qui attendent à une caisse de grande surface et qui semblent impatients, aux petits mots gentils que je ne manque jamais de dire à la caissière qui est tellement transparente aux yeux de certains, des petites choses qui peuvent rendre la vie plus agréable et à tous les actes que nous pouvons faire, même s'ils semblent anodins pour que la planète soit vivable. L'agressivité pourrit la vie, se débarrasser des malsains pour vivre mieux

J'ai pris beaucoup de plaisir en lisant ce roman. Je ne sais pas si je vais devenir un exemple de vie zen, j'ai déjà appris à prendre de la distance avec certaines choses depuis ma maladie, je vais continuer à réfléchir en espérant n'être jamais ennuyeuse, j'aime trop rire..

Bye MClaire.









dimanche 23 novembre 2014

"Pour seul cortège" Laurent Gaudé.


Laurent Gaudé, Goncourt pour le "Le soleil des Scorta". Je lis très peu les Goncourt mais celui-là oui et il était éblouissant.



L'auteur a écrit un roman épique, la fin d'Alexandre le Grand, sa mort, les trahisons de ses généraux, le partage de son empire et surtout il a fait de Dryptéis un personnage de femme magnifique. Dryptéis est la femme du frère d'Alexandre Héphaeston et la fille de Darius. 

Le livre débute par les premières douleurs d'Alexandre, pendant un banquet à Babylone, une douleur aiguë qui lui vrille le ventre, il se redresse, boit beaucoup et se met à danser jusqu'à épuisement, il s'écroule, on le transporte dans sa chambre, forte fièvre, lente agonie. Certains pensent qu'il a été empoisonné et d'autres qu'il a été victime d'un virus du Nil Occidental, une zone marécageuse.

Dryptéis s'est retirée du monde après la mort de son mari, elle vit au milieu des prêtres face aux hautes montagnes d'Arie, là où tout est immobile, elle vit là avec son petit garçon de quatre mois qu'elle a eu avec un berger, loin de toutes les intrigues. Sa vie va de nouveau être bouleversée, on la demande à Babylone, elle doit y aller, quitter ces prêtres qui chaque matin jettent une poudre jaune précieuse, du safran pour contenter les dieux. Quitter cet endroit où son enfant ne connaît que le silence, elle voudrait tant qu'il grandisse dans la paix, loin de cet Empire qui dévore tout, elle voudrait qu'il vive tout simplement, que personne ne sache qu'il est le fils de Dryptéis, cette princesse, fille de Darius, l'homme qu'Alexandre a vaincu.
Le destin veut qu'elle retourne vers Alexandre, elle se rendra à son chevet avec son fils, mais en cours de route la vieille Sisygambis la regarde et lui dit "Si tu y vas nue, ils ne pourront rien te prendre". Nue, cela veut dire sans son fils, elle doit le confier à la femme qui s'occupe de lui qui retournera vers les montagnes d'Arie et le confiera à une famille de bergers. Déchirement, son coeur de mère saigne mais elle doit le faire pour sauver son fils.

A Babylone elle retrouvera sa soeur Stateira, enceinte d'Alexandre, une femme qui connaîtra une fin de vie cruelle, étranglée alors qu'elle porte un enfant...

Je vous laisse découvrir la suite.

J'ai tout aimé dans ce roman que j'ai lu avec passion, j'aime l'histoire, l'antiquité, Alexandre le Grand était pour nous en cours d'histoire un personnage de roman, nous pouvions l'imaginer, blond, frisé, fort, transportant ses troupes jusqu'à l'Indus, ne faiblissant jamais.
L'écriture de Laurent Gaudé est précise, chaque mot, chaque passage ont dû être analysés pour nous éblouir. J'ai aimé Dryptéis cette femme qui entre en résistance contre un pouvoir qu'elle déteste, trop de sang, de lutte.

"Il est une chose qui reste solide, aussi solide que la puissance des montagnes, c'est le chant des femmes endeuillées.

La majorité des femmes n'aiment pas la guerre, elles ne veulent pas que les enfants qu'elles ont portés, élevés soient sacrifiés pour satisfaire la folie des hommes. C'est vrai ll y a la légende des Valkyries ou Walkyries, mais ce sont des légendes

Les dieux, les offrandes, les croyances, cet homme Ericléops décapité qui surgit au milieu d'une armée de morts pour faire reculer l'armée maurya, ils y croient.
Il y a la vie, la mort, la légende, la difficulté d'échapper un destin. Roman magnifique, il est vendu en poche chez Babel qui publie toujours des livres de qualité.

"Dis, pourquoi est-ce que des hommes et des femmes savent si bien écrire, comment font-ils pour nous entraîner dans leur imagination au point que nous n'entendons plus ce qui se passe autour de nous, scotchés sur un canapé en oubliant le temps qui passe" ça c'est moi qui l'écrit.

Laurent Gaudé est le Racine de notre époque.

Bye MClaire.




vendredi 14 novembre 2014

Jeanne Benameur "ça t'apprendra à vivre" - "Les réputations" de J.G Vasquez.



Je suis allée à la FNAC, je voulais acheter "Constellation", je n'avais pas trouvé ce bouquin chez Leclerc, ni chez Carrefour, épuisé certainement, il était sur les rayons à la FNAC, à l'entrée et dans le magasin, il doit bien se vendre. Je suis un peu contrariante, je le voulais et puis finalement non, je n'en voulais plus, j'ai préféré acheter le dernier Laurent Gounelle, j'aime cet auteur "Le jour où j'ai appris à vivre", Gounelle a une passion pour la philosophie, la psychologie, le hasard, la découverte de soi, j'ai lu trois livres de cet auteur et j'ai toujours aimé.
Comme à chaque fois je flâne dans les rayons, je touche les bouquins,  je les ouvre, je parcours, je repose et mes yeux se sont posés sur le livre de Jeanne Benameur "ça t'apprendra à vivre". 
Hasard, deux livres avec le mot VIVRE dans le titre.
C'est un livre de poche, un petit livre 112 pages, des paragraphes courts, je l'ai lu en deux heures avec une émotion que vous ne pouvez pas imaginer, ce n'était pas tout à fait ma vie lorsque j'étais enfant mais beaucoup de similitudes.

Jeanne Benameur est née en Algérie d'une mère d'origine italienne, le nord de l'Italie, blonde aux yeux bleus et d'un père arabe, cette alliance avait dû être difficile à vivre, il y avait très peu de couples mixtes, cela ne pouvait être qu'une "vie entre-deux" entre deux religions, deux familles différentes, des coutumes différentes. La guerre d'Algérie ne facilitait pas les choses, le père de Jeanne était chef de prison, l'OAS le menaçait, un soir tous les harkis qui protégeaient la prison ont été égorgés, un soir chez nous les fellaghas cognaient à toutes les portes et aux fenêtres, les militaires appelés en renfort ont tiré sur une forme blanche devant notre porte, des rafales de mitraillette.
La famille doit "s'exiler" rejoindre la métropole, une ville sur l'Atlantique, un appartement de fonction vieillot "Et nous on doit fonctionner avec" comme nous, mes parents ont toujours habité des appartements de fonction sans confort, la France, la pluie, l'humidité, le soleil qui manque, l'hostilité des autres. Le père rêve d'une maison à Saint-Raphaël, il en parle, une maison de famille "Elle vient de sortir de terre, de ta bouche. Papa tu mens, nous n'avons rien, ni ici, ni ailleurs, rien que nos mots. Pas de pierres pour faire de vrais murs. Pas d'herbe pour un vrai jardin. Rien. Nous n'avons jamais eu de maison à nous".

Sa mère a du mal à s'habituer à cette vie, comme la mienne lorsque mon père a été nommé à Béthune, cela devait être pire que La Rochelle, ma mère perdue qui avait mis des vieux chiffons dans une malle pour faire les vitres en arrivant, et avait tout laissé en Algérie pensant récupérer son déménagement qui n'est jamais arrivé. Quelle drôle d'idée que ces chiffons, mais ceux qui ne savent pas combien c'est dur de devoir choisir entre ce qu'on laisse et ce qu'on prend avec nous ont sans doute du mal à comprendre.

La mère de Jeanne ne regardait jamais sa fille, ou très peu, c'est la dernière des quatre enfants, la petite est clairvoyante, elle entend, elle voit, elle comprend, très tôt elle a su lire et écrire, les mots sont pour elle une sorte de liberté, elle écrit.
Petite elle résistait à deux choses, boire son café au lait avec une peau qui s'est formée parce qu'elle attendait trop longtemps, comme moi, je n'aimais pas le goût du lait de ferme "Allez bois" disait sa mère les mains sur les hanches, ma mère faisait la même chose, Jeanne ne voulait pas manger du beurre, je ne voulais pas manger des fèves "à l'étouffée", je résistais pendant des heures en promettant de vomir comme elle.
Jeanne avait peur des oiseaux, les becs des oiseaux la terrifiaient, comme moi. Voilà, j'ai compris pourquoi je n'aime pas tenir un oiseau dans ma main, ce sont les becs qui me terrifient.

Le livre se termine sur ces phrases "Un jour du mois de février, sous la pluie, on a creusé, on a enfoui.
Mais je ne peux plus perdre l'endroit.
Le nom de mon père est gravé sur la plaque".

Le nom de mon père est aussi gravé sur une plaque dans un cimetière bien loin de l'endroit où il est né, mais ce n'est qu'une urne qui est là, dans le mot horrible de "cavurne" une cave. Pour moi, l'incinération n'est pas l'enfermement, je refuse, plus tard, le plus tard possible je veux rester sur la terre, pas dans la terre, je n'accepte pas l'idée d'être enfermée..

J'aime beaucoup l'écriture de Jeanne Benameur, un peu sèche, des phrases courtes mais elle sait faire passer beaucoup de sentiments en très peu de mots. J'avais lu il n'y a pas très longtemps "Les insurrections singulières" j'avais écrit une gazette ici

Ce livre est une belle découverte, je suis contente d'avoir laissé mes yeux traîner le long des rayons de la Fnac.





Très beau livre sur la mémoire, sur le pouvoir des caricaturistes, le petit dessin qui paraît chaque jour dans un journal et qui peut détruire une réputation.

Cela se passe en Colombie, le pays de Rendon un caricaturiste célèbre qui s'est suicidé à l'âge de 37 ans. 
Javier Mallarino est dans le roman un caricaturiste célèbre, il a tous les honneurs, tout le monde le craint, ses armes, de l'encre de chine et du papier. Il est menacé, il perd sa femme qui préfère partir avec leur fille, trop d'orgueil, il est connu, il aime ce sentiment de puissance, elle ne supporte plus.
Un jour un fantôme du passé surgit Samantha Leal, une copine de sa fille qui était venue fêter l'anniversaire de son amie, il se passe une chose effroyable pendant cet anniversaire, les gamines vident tous les fonds de verre, ivres, elles sont allongées dans une chambre en attendant qu'elles dessoulent. Pendant la fête un député arrive chez Mallarino pour lui demander d'arrêter de le caricaturer, ses enfants n'en peuvent plus, sa famille souffre. La fête continue et l'irréparable ce produit, les invités voient le député descendre l'escalier, il a apparemment violé une des fillettes, Samantha. Le lendemain sa caricature est dans le journal avec une phrase " Adolfo Cuellar, député : Laissez les petites filles venir à moi". Il finira par se suicider.
C'est là que la mémoire intervient, est-ce que Javier se souvient vraiment de tout lorsque Samantha Leal vient lui demander de lui raconter cette soirée, elle veut savoir. La mémoire est faillible, nous pouvons inventer le passé.

Je m'arrête là, vous devez lire ce livre parce qu'il nous ramène à notre époque actuelle, à l'heure où la sphère publique et la sphère privée se mélangent. Nous savons tout, un dessin, un clic peuvent détruire des vies, des réputations.

Bye MClaire.




jeudi 6 novembre 2014

L'homme sans maladie - Arnon Grunberg.



Eric Reinhardt "L'amour et les forêts" n'a eu aucun prix, je considère ça comme une injustice, il a été souvent nominé mais jamais élu, il ne reste plus que le Goncourt des lycéens qui peut être me confortera dans mon idée, c'est le plus beau prix, ils sauront reconnaître que le livre de Reinhardt mérite d'être désigné, c'est le 18 novembre à Rennes. Attendons.

"L'absurdité est surtout le divorce de l'homme et du monde." Camus.
Une citation de Camus que j'ai trouvée sur le net, elle définit parfaitement le livre.

J'ai lu "L'Homme sans maladie", j'ai aimé, je l'ai lu doucement, il mérite que l'on s'attarde sur chaque ligne, bien écrit,  l'histoire de cette homme est passionnante.
L'homme lui même n'est pas passionnant, lisse, sans émotion visible, Sam est Suisse, il habite à Zurich, son père est indien, sa mère est Suisse, il fait tout pour gommer ce métissage. Sam a une soeur Aida, elle est atteinte d'une maladie musculaire dégénérative qui la cloue sur un fauteuil roulant, Sam aime s'occuper de sa soeur, lui laver les cheveux, lui parler, il est le pilier de la famille depuis que son père est mort.

Sam est architecte, il dira souvent dans le bouquin "Je suis architecte, je suis neutre, je suis citoyen suisse". Il a une tendre amie Nina, il aime sans passion cette jeune fille qui a un fin duvet sous le nez, même sa sexualité est complètement dénuée d'affection. Il n'est jamais malade, un homme sans maladie, ni physique, ni mentale.
Il est associé dans son cabinet d'architecte avec Dave. Un jour, ils reçoivent une commande d'un dénommé Hamid Shakir Mahmoud qu'ils ne verront jamais, il veut faire construire un opéra à Bagdad où les habitants de cette ville pourront écouter Puccini, Bagdad ville de tous les dangers où chacun se méfie de son voisin.
C'est à ce moment là que nous basculons dans l'absurde; Sam part à Bagdad pour rencontrer le commanditaire de l'opéra, il ne le verra jamais. Avant de partir Nina sa petite amie a mis un ruban vert à sa valise pour qu'il pense à elle, à l'aéroport il ne retrouve pas sa valise sur le tapis roulant, il la retrouve un peu plus loin mais s'apercevra plus tard que ses habits n'y sont plus, remplacés par d'autres affaires de mauvaise qualité, sales, Sam est bouleversé par cette découverte, lui qui est obsédé par la propreté.
Il se retrouvera très vite dans une situation critique, en un rien de temps il est prisonnier dans les cellules de l'Etat, déshabillé, attaché, on l'appellera "Chien" et on lui pissera dessus. Il en réchappera mais prendra goût à cette cruauté et demandera à Nina de lui pisser dessus dans le bac à douche avant de faire l'amour.

Sam ne comprendra pas que le monde est en train de changer, il acceptera de repartir pour Dubaï, l'Emir veut y construire une immense bibliothèque avec un bunker. Ce pays est en apparence paisible, qu'en apparence....Il y a beaucoup de cafards dans l'appartement de Sam à Dubaï, bizarrement il s'adaptera.... Son destin sera en marche.
"Tel un Kafka contemporain, Arnon Grunberg entraîne son héros, naïf et idéaliste, à travers des tribulations grotesques et cruelles, pour mieux le réduire en cafard d'une dérisoire comédie humaine".

Je vais vous laisser découvrir la suite de l'histoire si vous avez l'intention de lire le roman.

Il y a de très beaux passages sur le métier d'architecte, sur la conception d'un bâtiment.

Ce roman est la description de la condition humaine, beaucoup de noirceur mais aussi un peu d'humour. Il faut se laisser entraîner dans cet univers grotesque, violent..

Pendant ma lecture je me disais "ce livre me fait penser à un autre livre", c'était l'Etranger de Camus, le personnage est aussi imperméable aux sentiments que Meursault "un homme pauvre et nu". Il semble que ce soit aussi l'univers de Kafka, mais je ne peux pas juger, je n'ai jamais lu Kafka, juste des extraits, Kafka et Proust des auteurs oubliés par moi....

J'ai aimé lire ce roman dérangeant, corrosif. Merci à Augustin Trapenard de l'avoir recommandé.

Bye MClaire.



lundi 27 octobre 2014

"Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier" P.Modiano et Immortelle randonnée J.C Rufin.



Dans la vie il nous arrive de nous enticher d'une personne à la seconde où nous l'avons rencontrée et un peu plus tard nous regrettons, finalement elle n'était pas aussi bien que ça, nous regrettons notre emballement sans pour autant la rejeter. Pour les livres c'est exactement la même chose.




J'aime beaucoup lire J.C Rufin, c'est un auteur talentueux qui sait nous entraîner dans ses histoires, j'aime bien l'homme aussi, il a vécu mille vies.

J'avais très envie de lire cette "Immortelle randonnée" mais j'achète très souvent les livres lorsqu'ils paraissent en poche, je fais aussi des exceptions si je suis trop impatiente. Là, j'ai attendu et je ne regrette pas cette attente, j'ai économisé 11 euros, j'ai pu acheter deux autres livres de poche !!

J'ai commencé le bouquin avec enthousiasme, j'ai dévoré la moitié du livre et puis j'ai senti que l'ennui commençait à s'installer, ça manquait de peps, le mot n'est pas approprié pour le chemin mystique mais c'est celui qui m'est venu à l'esprit.

J'avais déjà lu deux bouquins sur ce chemin, celui d'Alix de Saint-André et celui de Laurence Lacour il y doit bien y avoir une dizaine d'années mais je m'en souviens encore.
Deux très beaux livres. L'expérience des uns ne servant jamais aux autres, le chemin ne peut pas être compris de la même façon par ceux qui décident un jour de le parcourir, je pense que nous pourrions lire une multitude de livres le décrivant sans avoir l'impression de toujours lire le même bouquin.

J.C Rufin décide un jour de marcher 800 km par le chemin du nord, le moins emprunté, un des plus difficiles, il est parti d'Hendaye.

J'ai aimé l'écriture, toujours parfaite, les mots bien choisis, les portraits des gens rencontrés, rien à dire tout est bien écrit. J'ai moins aimé sa vision des autres pèlerins, il essaie quelquefois de faire de l'humour et n'y arrive pas, on le penserait confiné dans son habit d'académicien, il se complaît dans la description de la crasse, des pieds qui puent, dans un chapitre il fait caca dans un parc et a peur d'être vu, nous aurions pu nous en passer, tout ça ne sonne pas juste à mon avis. Alix de Saint-André me faisait vraiment rire, lui non.
Laurence Lacour m'avait touchée dans sa description du chemin en hiver, lui non.
Pour finir, l'arrivée à St-Jacques est vraiment décevante, c'est sans doute vrai mais je n'avais pas envie de savoir.
J'ai toujours rêvé de faire une partie de ce chemin et là je n'avais plus envie. De toutes les façons c'est beaucoup trop tard, je n'ai plus tous les moyens physiques pour le faire, mais j'avais encore envie de rêver. J.C Rufin dit une chose qui doit être vraie, c'est plus un chemin boudhiste qu'un chemin chrétien.

On dit de St-Jacques de Compostelle

"Le pèlerin use ses chaussures et, au fur et à mesure, use ses habitudes"

Vous pouvez le lire, c'est tout de même un beau récit mais pour moi pas aussi enthousiasmant que je le pensais. 

Passons au livre de Patrick Modiano que je n'avais pas trop envie de lire, trop d'actualité à son sujet, ça me lassait.

Je l'ai lu d'une traite tout à l'heure, installée dans mon relax au soleil sur la terrasse et je ne mens pas j'avais trop chaud.

J'ai dû lire deux livres de Modiano, dont le fameux "Rue des boutiques obscures", c'est le troisième et je suis enchantée après sa lecture. Je me suis laissée prendre par la fameuse "petite musique" de Modiano. C'est limpide, pas une seconde d'ennui, un grand écrivain, il mérite le Nobel.

Le livre met en scène Jean Daragane, un vieil écrivain qui vit reclus dans son appartement, plus personne ne téléphone et pourtant un jour le téléphone se met à sonner avec insistance, un homme veut lui rendre un petit carnet d'adresses qu'il aurait perdu dans une gare. Jean Daragane croit déceler une voix un peu menaçante mais il se déplacera pour se rendre au rendez-vous fixé. Dans ce carnet des numéros de téléphone inutiles, c'est vrai, si nous mettions à jour notre agenda combien de numéros devrions nous barrer ? Beaucoup, des gens que nous avons oubliés ou qui nous ont oubliés, des gens disparus.

« aucun des noms n’appartenait aux personnes qui avaient compté dans sa vie et dont il n’avait jamais eu besoin de noter les adresses et les numéros de téléphone » :
« Il les savait par cœur. »

Cette rencontre va déclencher des souvenirs du passé qu'il pensait bien enfouis.

Nous savons si nous nous intéressons aux livres que Modiano tourne toujours autour des même thèmes, la solitude, la vieillesse, la mémoire, les lieux, les rues de Paris.
Dans ce livre il est beaucoup question de Saint-Leu-La-Forêt que je ne connais pas sauf lorsqu'il est question de scrabble, il y a un club à Saint-Leu. J'ai donc découvert cette ville de banlieue dans le roman de Modiano.

J'ai aimé la description du sentiment d'abandon qu'ont les vieilles personnes :
"A cause d'une trop longue solitude-il n'avait parlé à personne depuis le début de l'été-, vous devenez méfiant et ombrageux vis-à-vis des vos semblables et vous risquez de commettre à leur égard une erreur d'appréciation..." Comme dit l'auteur, faire la planche et se laisser dériver.

La fin du roman est une zone d'ombre, mais je m'y attendais.

Epigraphe de Stendhal : 

"Je ne puis pas donner la réalité des faits, je n'en puis présenter que l'ombre".

J'ai beaucoup aimé ce roman.   Bye MClaire.




dimanche 19 octobre 2014

Eric-Emmanuel Schmitt "Les deux messieurs de Bruxelles"



Si j'étais encore une petite fille qui a du mal à s'endormir sans qu'on lui raconte une histoire, j'aimerais que cela soit Eric-Emmanuel Schmitt qui le fasse. J'adore et le mot n'est pas trop fort cet auteur. C'est un conteur, avant d'être écrivain il a été prof de philo, agrégé de philo.
Il écrit d'une façon légère, souriante, bouleversante, il sait décrire les sentiments et faire deviner ceux que nous n'osons pas avouer.




Il a écrit cinq nouvelles complètement différentes et toutes aussi intéressantes.

La première un couple gay qui décide de se marier dans l'anonymat, derrière un pilier d'église pendant un vrai mariage, ils font les mêmes gestes, disent les mêmes paroles que le couple composé de Geneviève et Eddy, deux jeunes gens d'un quartier ouvrier de Bruxelles. Jean et Laurent décideront de s'approprier ce couple, ils le suivront pendant des années, toujours cachés, assisteront au baptême de leur premier enfant et du second aussi, mais le couple a bien changé, Geneviève ne semble pas heureuse et Eddy est devenu un mufle.
Cinquante cinq plus tard Geneviève reçoit la visite d'un notaire qui lui demande si elle accepte un héritage, elle ne connaît pas le donateur et finit par accepter, l'histoire commence.....Il est beaucoup question d'amour entre ces deux messieurs de Bruxelles.

Deuxième nouvelle : Le chien. Samuel Heymann qui est médecin à la retraite a toujours possédé un chien Argos, un beauceron, toujours le même chien, toujours le même nom. Son dernier chien se fait écraser, Samuel a 80 ans, ne supporte pas cette disparition, il se suicide. Sa fille Miranda veut connaître le secret de son père, elle s'adresse à l'auteur qui a plus ou moins fréquenté son père, sans vraiment être devenu son ami, seul l'amour d'un bon whisky a fait qu'ils se sont parlés. 
Avant de mourir Samuel a écrit quelques feuillets à l'auteur qui lui seront remis, le premier feuillet "Cher écrivain qui parle davantage qu'il n'écrit". Il veut que ce soit l'écrivain qui lise ses confessions avant de les transmettre à sa fille.
Cette nouvelle, est magnifique, bouleversante d'humanité, une histoire sur le pardon, mais peut-on toujours pardonner? J'ai beaucoup aimé.

Troisième nouvelle : Ménage à trois. La plus amusante et la plus surprenante.
Une veuve plus très jeune et pas vraiment jolie veut se caser, elle jette son dévolu sur un diplomate danois qui finit par la demander en mariage mais qui ne cesse pas de lui parler de son premier mari, un musicien qu'elle appelle un croque-notes, un mauvais musicien d'après elle, lui trouve qu'il avait du génie... Qui est cet homme qui se glisse au milieu de leur relation? Je ne vous raconte pas la suite.

Quatrième nouvelle : Un coeur sous la cendre et là j'ai pensé "Ce n'est pas possible, deux livres à la suite qui me parlent de l'Islande, c'est un signe, nous allons y aller un jour".

Alba est la tante de Jonas, Jonas a un problème cardiaque, il faudra le greffer, Alba a un fils Thor mais elle entretient une relation fusionnelle avec son neveu qu'elle adore. Thor a un accident de moto, accident mortel, il avait décidé de donner ses organes, à qui est allé son coeur? 
Une histoire vraiment touchante sur le don d'organes, sur le désir de vérité, sur la haine qui s'empare d'un être bouleversé par la disparition d'un enfant qui était sa chair. Une histoire qui s'achèvera dans la douceur, dans la paix retrouvée. Le printemps sera bientôt de retour.
L'Islande est superbement décrite, la nature de ce pays "Les téphras du volcan giclaient au sol, parfois aussi ténus que des oeufs, parfois pansus comme des menhirs".

Cinquième nouvelle : L'enfant fantôme. L'histoire d'un grand amour entre un homme et une femme qui s'aiment d'une façon égoïste, ils n'ont pas besoin des autres, même pas d'un enfant, leur enfant est leur couple, mais l'horloge biologique est là, la femme est prise d'un désir d'enfant malgré les risques d'une maladie génétique, l'enfant risque d'être atteint de pathologies invalidantes et en effet lorsque Séverine arrive à être enceinte, les examens révèlent que le bébé a la mucoviscidose...

J'espère que j'en n'ai pas trop dit, une copine scrabbleuse me disait l'autre jour qu'elle lisait toujours ma gazette mais qu'elle attendait un peu pour acheter le livre, l'instant où elle aurait un peu oublié l'histoire.

Malou à qui j'ai prêté le livre que Michelle avait acheté "L'amour et les forêts" D'Eric Reihnart m'a dit hier "Je l'ai fini à 3h du matin, complètement bouleversée, je ne l'ai pas ramené parce que je veux relire le début" Elle m' a dit la définition exacte de ce livre "Un livre horriblement beau".

A Nantes aussi une scrabbleuse m'a dit qu'elle était en train de le lire après avoir vu ma gazette, elle adorait.

Lisez "Les Deux Messieurs de Bruxelles", il est en poche, l'auteur vous amènera sur le questionnement de la nature humaine, tout est ciselé, l'écriture est parfaite comme d'habitude, je m'exalte, je m'exalte mais j'ai raison. L'AMOUR. J'espère avoir réveillé en vous l'envie de le lire, sinon tant pis, vous passerez à côté d'un très bon moment.

Bye MClaire.






samedi 11 octobre 2014



Un vrai, un très grand bonheur de lecture. Vous ne pourrez pas rester insensible à ce livre si vous ne l'avez pas encore lu, il a été un immense succès dans les pays scandinaves et en Allemagne.

J'aime beaucoup les écrivains nordiques, je ne connaissais pas Bergsveinn Birgisson. Je badais dans les allées de Leclerc-Culture sans idée précise et la couverture du roman était attirante, j'ai pris le livre, j'ai lu le résumé de l'histoire et j'ai su que j'allais beaucoup aimer. Aucune déception, au contraire.

J'aime les écrivains nordiques autant que les écrivains latins, par opposition, j'aime aussi les pays nordiques et j'aimerais aller en Islande. L'Italie me plaît, la Norvège, la Suède aussi, évidemment pour des raisons différentes, nous passons du bruit de la rue, des gens qui parlent fort, des sentiments exprimés au silence, à la discrétion, l'impression d'être dans un autre monde, déconcertant pour nous latins et la nature est splendide.

L'histoire se passe en Islande, c'est une longue lettre de 130 pages adressée à Helga, l'auteur Bjerni a aimé passionnément Helga et à l'orée de sa mort il lui adresse une lettre pour lui dire combien elle a été importante dans sa vie malgré sa lâcheté à lui, il n'a jamais voulu quitter sa campagne pour la suivre à Reykjavik, ils étaient mariés chacun de leur côté, elle était prête à tout pour lui et lui non malgré son immense passion pour elle.
Ce roman est un hymne aux traditions, à la campagne, à la vie calme, simple, au désir crûment décrit quelquefois, à l'amour obsessionnel et Bjerni a un amour inconditionnel pour la nature, pour ses brebis, pour la pêche en solitaire, pour son travail de contrôleur de fourrage et cet amour l'empêche d'assouvir son amour pour Helga jusqu'à la fin, il se spolie seul.

'Certains meurent de causes extérieures. D'autres meurent parce que la mort depuis longtemps soudée à leurs veines travaille en eux, de l'intérieur. Tous meurent. Chacun à sa façon. Certains tombent par terre au milieu d'une phrase. D'autres s'en vont paisiblement dans un songe. Est-ce que le rêve s'éteint alors, comme l'écran à la fin du film ? Ou est-ce  que le rêve change simplement d'aspect, acquérant une autre clarté et des couleurs nouvelles ? Et celui qui rêve, s'en aperçoit-il tant soit peu ?".

Ce sont les premières phrases du livre.

L'écriture est souvent poétique, j'étais touchée à chaque ligne par les mots du narrateur.

"L'amour ne se réduit pas au romantisme citadin où il s'agit de trouver la seule, la vraie qui comblera votre âme jusqu'à la faire déborder et dégouliner telle une pompe intarissable. L'amour est présent aussi dans cette vie que j'ai menée ici, à la campagne."

"Ici à la campagne, j'ai eu de l'importance. Et si ce n'est qu'une idée, au moins aurai-je eu l'impression d'en avoir. Voilà une différence qui compte. Ici j'ai pu voir le fruit du travail de mes mains".

"Je ne veux pas dire que tout est réellement merveilleux par ici, ni que les gens sont des anges. Bien sûr, ici il y a des ragots, la jalousie, et toutes sortes de conneries qui vont avec l'espèce. Mais ces gens là vous dépanneront d'un pneu de tracteur en cas de besoin".


Il dit quelquefois en parlant de sa Belle "Tu es belle comme un tracteur" mais pour lui c'est la plus merveilleuse façon de décrire la beauté d'Helga. 

J'ai aimé le passage où il décrit tout ce qu'il fait de ses mains et pas des objets qui viennent des quatre coins du monde "Le premier a une âme et l'autre non".

J'ai aimé découvrir l'âpre existence de ces Islandais qui ne peuvent pas enterrer leurs morts lorsque tout est gelé, le chapitre du fumage du corps pour attendre le printemps est saisissant. 

Je sais que si je visitais ce pays je ne pourrais pas l'oublier parce qu'il ne doit ressembler à aucun autre.

J'ai aimé faire ce voyage en lisant ce livre à défaut de le faire vraiment mais qui sait?

Lisez ce roman, vous ne regretterez pas ces quelques heures passées dans votre canapé parce que vous n'arriviez pas à lâcher le livre.. C'est un magnifique chant d'amour, adressé à une femme et à la nature... 

J'ai quelques livres qui attendent, Michelle a alimenté la pile. Hier, j'avais acheté en poche "Immortelle randonnée" de J.C Rufin et il a été oublié sur le tapis de la caisse chez Carrefour, je vais le récupérer la semaine prochaine, j'attendais avec impatience qu'il sorte en poche, je vais encore attendre un peu.


 Bye MClaire.







vendredi 3 octobre 2014



C'est le troisième bouquin de cet auteur que je lis. J'avais aimé "La liste de mes envies", aimé un peu plus parce que l'écriture avait pris de l'assurance et que l'histoire me plaisait "La première chose qu'on regarde", je n'ai donc pas hésité une seconde à lire ce troisième livre  Trois romans écrits en trois ans, pas mal.

Autant le dire tout de suite, je suis très partagée, j'ai aimé, je n'ai pas aimé...et pourtant je l'ai lu presque d'une traite, alors que j'avais abandonné deux livres avant celui-là. J'abandonne si je m'ennuie et c'est assez rare, là je ne me suis pas ennuyée, pas une seconde, mais l'histoire est tellement noire, triste, nous pouvons être désorientés. Je cherche les raisons, la première à mon avis est que j'ai encore en tête le livre de Reinhart "L'amour et les forêts'", un roman noir magnifique et le livre de Delacourt ne supporte pas la comparaison 
J'ai beaucoup aimé à partir de la deuxième partie, celle qui est plus lumineuse, la rédemption d'un homme sous le soleil du Mexique et le cheminement du pardon d'une fille envers son père, là je l'avoue c'est vraiment superbe.

L'histoire :

C'est l'histoire d'Antoine, 38 ans, il travaille dans les assurances, son boulot: traquer les fraudes, il est expert
Antoine traîne avec lui une immense tristesse, le mal d'amour, sa mère est partie vivre sa vie en le laissant seul avec un père un peu lâche, sans envergure et Anne sa petite soeur qui vient de perdre sa jumelle Anna, à 7 ans celle-ci ne s'est pas réveillée. Anne n'arrivera plus à prononcer une phrase complète, un mot sur deux, un langage mutilé, amputé. Antoine liera des liens avec cette petite soeur qui ne s'occupait jamais de lui puisqu'elle vivait avec son double, ils seront deux pour essayer de se reconstruire dans une famille qui vient d'exploser et un père qui n'a jamais eu un geste de tendresse, ça ne se faisait pas, Antoine est docile, impuissant, il ne se rebelle pas comme son père à qui il ne voulait surtout pas ressembler.
La lecture du début de ce livre est pesante, toutes les misères du monde sont rassemblées, le chômage, le cancer, les enfants délaissés, le départ d'un des parents, tous les maux de notre société, dans le livre c'est même un peu trop.
Antoine rencontre Nathalie, ils s'aiment trop vite, trop passionnément, Joséphine naît et Nathalie prend un amant, elle revient, Léon naît et finalement elle repart. Antoine est de nouveau abandonné.
Il perd son travail accusé d'avoir voulu favoriser une assurée.

Il y a de quoi péter les plombs et c'est ce qui arrive. Le pire, l'irréparable.

La deuxième partie est beaucoup plus lumineuse, Antoine part s'installer au Mexique, près de Puerta-Vallarta, il devient homme de ménage dans un hôtel, le "Desconocido" l'inconnu. Il rencontrera un enfant dans une rue qui lui demandera de jouer au foot avec lui, puis Matilda la "soeur" du gamin, supposée être sa soeur, l'amour naîtra doucement, ils ne sont pas pressés "Notre famille naît dans le silence. Dans la grâce. Dans la paix enfin".

La troisième partie est bouleversante, racontée par Joséphine la fille d'Antoine. Le pardon sera au rendez-vous au bord d'une plage mexicaine. J'ai pleuré évidemment.

Il faut se blinder avant de commencer à lire, rendre étanche tous nos sentiments si nous ne voulons pas nous laisser submerger par l'émotion, je n'ai pas pu le faire et c'est sans doute la raison pour laquelle le début de ce livre m'a paru pesant, si sombre.
Ce petit garçon je l'ai aimé et j'ai détesté ses parents incapables de dire "Je t'aime", cette absence d'amour est insupportable. J'ai aimé cet enfant et j'ai moins aimé l'adulte qu'il est devenu, lâche comme son père mais toujours à la recherche de sa mère, il la retrouve mais cette rencontre ne sera pas salvatrice, au contraire. Il ne sait pas se révolter et ça les femmes n'aiment pas, elles partent. C'est très difficile d'être un gentil dans notre société, il vaut mieux être un peu voyou, lui ne sait pas, lui aurait juste voulu que son père réponde à la question " Comment se forme la pluie" et son père n'a pas répondu. Lui aurait juste voulu que sa mère ne réponde pas "A quoi ça sert" lorsqu'il a demandé si elle l'aimait. 

"Ce n’est pas que je n’ai pas voulu de toi, disait-elle ; je n’ai pas voulu de moi. Je ne comprenais pas. Elle a essayé de m’expliquer : elle ne s’était pas rêvée en parfaite petite mère de famille. Ça ne l’intéressait pas, c’est tout. Mais moi ? avais-je demandé. Moi, tu m’aimes, maman ? Tu m’aimes ? Elle m’a répondu : sans doute. Sans doute, mais à quoi ça sert ? ».

Il y a aussi l'écriture bien particulière, des phrases courtes, un style un peu hachuré. Au début de chaque chapitre dans la première partie il y a un prix, le prix d'une vie, le prix d'un geste, le prix d'un objet, notre société de consommation.

Pour une raison plus personnelle, cela m'a fait plaisir de relire les descriptions de la région de Puerta-Vallarta, nous connaissons, nous y sommes allés deux fois, pourtant c'est là que nous avons failli perdre la vie dans un tremblement de terre, mais oublions et essayons de nous souvenir que des beaux moments, des paysages magnifiques, de l'océan qui peut être meurtrier, les vagues sont puissantes on peut très vite se retrouver dans un tambour de machine à laver. La région de Puerta-Vallarta est aussi évocatrice de films "La nuit de l'iguane" par exemple..

Voilà mes impressions, à vous de juger, je suis sortie un peu secouée de ce bouquin mais vous? J'allais oublier j'ai aimé la petite phrase d'introduction d'Henri Calet "Ne me secouez pas, je suis plein de larmes".

 Bye MClaire.


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