lundi 26 décembre 2016


J'avais lu "Séduire Isabelle A." avec plaisir, j'ai trouvé chez Easy-Cash "Mer agitée à très agitée" du même auteur, toujours à un prix défiant toute concurrence, je l'ai acheté. Il attendait d'être lu, son moment est venu. Il était le dernier dans ma pile, je suis allée me réapprovisionner avec mes bons cadeaux et ma fournisseuse officielle Michelle doit avoir des livres à me prêter, en ce moment break de scrabble, les fêtes, nous ne nous voyons pas.

Ce livre a une jolie petite musique, nostalgie, la jeunesse, la vieillesse, la mer, la Bretagne, les vacances.

L'histoire :

Maryline a été un top-modèle vedette pendant les belles années, elle voyageait beaucoup, rencontrait des célébrités, faisait la fête, elle a connu William star du rock, il se droguait, commettait des excès, elle l'aimait, ils s'aimaient. Maryline a hérité d'une grosse bâtisse sur la côte bretonne, elle décidera de repartir dans ce village où elle a passé toute sa jeunesse et surtout éloigner William de ses démons, loin des paillettes du show-biz. Elle transformera la maison en chambres d'hôtes, William ne se droguera plus, boira beaucoup, il se liera d'amitié avec deux drôles de personnages de la station, Herr un antiquaire et Flag hypocondriaque. 
La découverte du cadavre d'une fille sur la plage en bas de la maison bouleversera le cours de leurs vies, à tous.
Surgit Simon le policier, ami d'enfance, premier amour de Maryline, il sèmera le trouble dans sa vie presque bien rangée, elle commençait à se lasser de William qui rentre souvent ivre. Simon sera là, à l'excès, pour lui redonner le goût de la passion. Jusqu'à quand ?
Dans cette grande maison vit la fille de Maryline et de William, une ado difficile un peu ronde Georgia, vit aussi pour quelques mois de vacances, Miss Meriman et Annick la femme de ménage.

Ce n'est pas un roman policier ou si peu, pas vraiment un roman d'amour, un mélange des deux que nous pouvons lire avec plaisir.

J'ai aimé les réflexions de Miss Meriman, sur la vieillesse, sur les couples :
"C'est affreux ces couples qui s'éteignent dès qu'ils sont seuls. il suffit qu'ils se sachent regardés et ils s'animent à la manière des automates. On s'éloigne et leurs mains retombent, mortes le long de leur corps."
Ne plus rien avoir à se dire doit être horrible.

"Avez-vous remarqué que nos états d'âme, nos émotions au moment où ils apparaissent et s'installent dans notre esprit sont des paysages avec leur lumière particulière, une densité propre et leur propre géographie ? Je suis vieille et je ne peux plus compter sur aucun de mes sens. Tout est devenu intellectuel. Il n'y a plus de coulisses, vous voyez ? ..C'est un prodige, vous savez, de rester gai et souriant après soixante-dix ans."
Je ne suis pas d'accord, j'ai plus et j'ai toujours envie de rire.

"Vous savez, ma chère, nous passons notre vie à protéger les autres d'eux-mêmes, à essayer de comprendre de quoi sont faits ceux que l'on rencontre. On finit toujours par s'apercevoir que les personnalités indéchiffrables le sont parce que nous ne parvenons pas à savoir comment eux nous voient."
Je suis d'accord, mais il arrive toujours un moment où nous lâchons prise, les autres sont moins importants, leur avis sur nous compte beaucoup moins, même plus du tout. La sérénité de la vieillesse pour certains.

Il y a aussi les tourments de l'adolescence qui sont très bien décrits.

La description de tous ces personnages est la réussite du livre, ils sont bien croqués. Maryline est une femme de son temps, est-ce qu'elle réussira à préserver l'équilibre de tous ?
Lisez ce livre si vous en avez envie, il oscille entre la comédie et le drame.

Bye MClaire..


samedi 17 décembre 2016

Karine Tuil - L'invention de nos vies.


"Avec le mensonge, on peut aller très loin mais on ne peut pas en revenir", énonce un proverbe yiddish 
Cité dans le roman.

Ce livre a été publié en 2013, il est en poche. Recommandé par un scrabbleur-lecteur. Je n'ai pas regretté une seule seconde de l'avoir acheté, je l'ai lu avec avidité, hier, je suis restée assise trois heures sans bouger, je lisais.

L'histoire :

Un trio, Samuel, Nina, Samir Tahar. Samuel et Nina s'aiment ou plutôt sont amants, il l'aime, elle un peu moins. Samir est l'enfant d'une femme de ménage d'origine maghrébine, Samuel est un enfant adopté par un couple d'intellectuels convertis au judaïsme, très pratiquants, la révélation de l'adoption de Samuel sera un choc terrible pour lui, il claquera la porte.  Ils vivent tous les trois dans une cité sous tension de la banlieue

Samuel doit se rendre en Israël, son père et sa mère sont morts dans un accident de voiture, ils voulaient être enterrés en Israël, il accompagnera les cercueils,  il confie Nina à Samir, il doit veiller sur elle pendant son absence, il a tort, une attirance physique irrépressible réunit Nina et Samir, Samuel enterre ses parents et Samir couche avec Nina, mais le retour de Samuel se transforme en tragédie, Nina doit faire un choix, Samuel menace de se suicider, elle restera pendant vingt ans avec lui par pitié. 
Samir s'éloignera, fera des brillantes études de droit à Montpellier, Nina restera son obsession mais il ne cherchera pas à la revoir. Il s'envolera pour New-York, 

Samir deviendra Sam Tahar, il a supprimé deux lettres à son prénom, se fera passer pour un juif séfarade, le nom Tahar peut être juif ou arabe, Sam trouvera du travail dans un grand cabinet d'avocats, Samir n'en trouvait pas, trop arabe. une carrière prestigieuse s'offrira à lui, il deviendra le meilleur avocat pénaliste de l'état de New-York il épousera une riche héritière juive, Ruth, il aura deux enfants. Une vie basée sur un mensonge débute. Sam se permet tout, sûr de lui, inconscient du danger, il peut être démasqué. Infidèle, séducteur, très sexe, manipulateur, un imposteur charmeur.
Il arrive à oublier sa mystification identitaire.
Nous ne pouvons nous empêcher de penser à DSK qui pensait n'être jamais puni.

Il a évincé sa mère Nawel et son demi-frère de sa vie, la seule chose qui le culpabilise, sa mère reçoit sa visite rarement, sa plus grande honte, une faute morale, chez eux la famille est sacrée, quant à son demi-frère il ne le connaît pratiquement pas, François, blond, peau claire, est l'enfant d'un député connu,  Nawel sa mère était femme de ménage chez lui, il ne le reconnaîtra pas, les abandonnera, surtout ne pas briser sa vie de famille bien ordonnée.
François sera celui qui mettra Sam en danger...Mauvaises fréquentations, embrigadement.

Samuel arrivera à l'âge de quarante ans, aigri, il voulait être écrivain, tout ce qu'il écrit est refusé par les éditeurs, il ne sera qu'animateur social, petite vie étriquée, incapable d'offrir à Nina la vie dont elle rêve, mais un soir, un reportage à la télé va bouleverser leur vie, Sam est interviewé par une grande chaîne de télé américaine, ils le reconnaissent, font des recherches sur internet.. Samuel comprendra très vite que Samir s'est emparé se sa vie pour construire la sienne.

Et il y aura Nina, la magnifique Nina.. Le trio se reconstituera et explosera une nouvelle fois.

Je n'en dis pas plus.

Ce que j'ai aimé :

Evidemment l'écriture, rapide, originale, forte, un style qui nous tient en haleine.
J'ai moins aimé les petites notes à la fin de quelques pages, elles me semblent d'aucune utilité, je n'ai pas tout lu.

Ce livre publié en 2013 raconte tous les maux de notre époque, le trafic de drogue aux portes des immeubles, la violence dans les caves, "les tournantes", les jeunes qui se laissent embrigader pour aller combattre en Afghanistan ou ailleurs et qui reviendront pour commettre le pire, qui n'ont pas peur de mourir. La discrimination dans la recherche d'un emploi. C'est aussi un roman social.

Les affres de l'écriture, j'avais lu un jour que le premier livre d'un écrivain est souvent l'histoire de sa vie ou de sa famille, souvent autobiographique. Samuel finira par être publié avec succès en racontant l'histoire de leur trio. Il faudra écrire un deuxième livre et cela deviendra très compliqué.

Cette cicatrice au cou que porte Samir et qui résume un peu son histoire, il a essayé de la faire disparaître mais elle est toujours là pour lui rappeler d'où il vient.

J'ai aimé la décision des deux femmes Nowel et Nina, devenir des femmes libres qui ne dépendront plus des hommes. Ne seront plus soumises à leur désir, attendre qu'ils les appellent, ces hommes qui sont souvent des pervers narcissiques, ils veulent des femmes dépendantes d'eux. Elles se libéreront.

Je ne suis pas arrivée à détester Samir, le charmeur, la fin du livre est belle, enfin il pourra être lui même.

Je pense avoir tout aimé dans ce roman, lisez-le.


Noël arrive, faites vous offrir des livres, j'ai souvent un bon d'achat de la FNAC, je vais choisir, le dernier roman de Karine Tuil peut être ?




Bye MClaire.







samedi 10 décembre 2016

"Ce pays qui te ressemble;" Tobie Nathan.



Le visage de l'auteur ne m'est pas étranger, nous avons dû le voir à la télé, je n'ai lu aucun livre de ce psychiatre et spécialiste de l'ethnopsychiatrie. 
J'ai lu "Ce pays qui te ressemble." avec beaucoup d'intérêt, un livre de 540 pages avec quelques longueurs, j'ai sauté quelques lignes, les prières revenaient un peu trop souvent, elles ne me semblaient pas indispensables à la compréhension du livre, mais si elles n'avaient pas été
 citées, l'histoire n'aurait sans doute pas eu toute sa crédibilité. 
Nous comprenons très vite que les habitants juifs d'un quartier du Caire pratiquaient un peu la sorcellerie, étaient très superstitieux, priaient sans cesse pour protéger l'un des leurs et si cela ne suffisait pas s'alliaient aux arabes pour que l'une des leurs enfante, stérile depuis trop longtemps.

C'est une saga qui débute dans les années 1920 et finit à la chute du roi Farouk, Nasser le chasse, en 1952. Un roman historique et un grand roman d'amour.

Zohar, le héros du livre, naît dans ce ghetto juif du Caire, sa mère est considérée un peu folle, sujette à des crises d'hystérie, mais Esther est une jeune fille flamboyante, elle épouse Motty qui est aveugle, un immense amour les réunira lui l'aveugle qui devine tout et elle qui sera la lumière de ses yeux. Elle ne sera pas enceinte pendant des années, une sorcière arabe lui permettra d'avoir un enfant après toutes sortes de rites.
Les mauvaises langues qui se réunissaient sur les marches de la ruelle dite du jeudi critiquaient beaucoup Esther, mais elles la craignaient aussi, elles pensaient qu'elle possédait des dons.
Lorsque Zohar naît, petit garçon chétif, Esther ne peut pas le nourrir, pas une goutte de lait, elle doit faire appel à une nourrice qui allaite Masreya, une magnifique petite fille qui aura une voix d'or et qui plus tard charmera le roi Farouk.
Les coutumes juives interdisent à deux enfants de lait de s'unir plus tard et pourtant Zohar et Masreya seront attirés l'un vers l'autre. La malédiction planera sur eux.
Zohar sera un enfant un peu bizarre pendant quelques années, il aura du mal à trouver sa place au milieu de ses deux parents qui s'aimaient tant. Il deviendra un jeune homme un peu taciturne mais "dégourdi", réussira dans les affaires, jusqu'à ce qu'il soit obligé de quitter l'Egypte, les juifs seront persécutés. Ils possédaient un passeport italien, fourni par les Italiens pour qu'ils acclament le maréchal Pietro Badoglio en visite officielle au Caire, en tendant le bras droit, habillés avec une chemise noire.
En fuite, en quittant l'Egypte, ils passeront tout naturellement par l'Italie.
Le roi Farouk adulé par son peuple lorsqu'il était plus jeune, sera détesté à la fin de son règne et obligé d'abdiquer en 1952.
Un pays où se côtoyaient toutes les religions, un pays envahi par les grecs, les turcs, les coptes, les juifs, les apatrides et qui sera à son tour victime des Frères Musulmans, de quelques fanatiques qui rendront ce pays dur, intolérant, déserté par les touristes plus tard.
Nino le jeune juif ami de Zohar se convertira à l'Islam, des pages sur la façon d'enrôler les jeunes "
– Notre prophète est un chef de guerre. Il nous guide par l’exemple. La communauté se réveillera par la guerre. Le djihad est l’exigence de la guerre… et la mort, notre plus fidèle alliée. – Que veux-tu dire ? – Il te faut comprendre, mon frère, si tu veux nous rejoindre. Notre amour de la mort, c’est la présence de Dieu. Tel est l’enseignement du Prophète. Et il répéta : – Tu dois aimer la mort !

J'ai aimé les paroles d'Esther ;
"Nous vivons près des Arabes comme un homme vivrait près de son foie. Leur Coran contient nos histoires et notre bouche est emplie de leur langue. Pourquoi ne sont-ils pas nous ? Pourquoi ne sommes-nous pas eux ?"
Question éternelle entre des peuples qui se ressemblent et qui n'arrivent pas à cohabiter.
Faux de croire qu'un pays ne peut vivre qu'habité par une seule communauté, nous avons besoin des autres.

Ce que j'ai aimé :

Apprendre et encore apprendre. Ce livre est un voyage dans une Egypte que je connais très peu, les livres d'histoire ne disent pas tout. L'occupation de l'Egypte par les Anglais qui voulaient grignoter sans cesse un peu plus de territoire.

En lisant les frasques du roi Farouk j'ai souri, les lectures de "Point de vue et images du monde" me revenaient en mémoire. Farouk fréquentait les actrices, les casinos, il était photographié. Il était devenu énorme.
Farouk avait eu un grave accident de voiture en Egypte et il n'était plus du tout le même après son séjour à l'hôpital, choqué. Je ne savais pas qu'il avait été cleptomane, il volait des objets précieux dans les maisons où il allait, au point que les propriétaires cachaient tout avant sa visite.
L'auteur nous fait découvrir les moeurs dépravées des puissants, le Shah d'Iran n'y échappe pas. 
Sa plume est quelquefois acérée.
J'ai aimé les odeurs, les parfums, la douceur de vivre dans cette ville avant la guerre. Les descriptions du désert, des bords du Nil. La sensualité du livre.
J'ai aimé lire la nostalgie de l'auteur "Si j'ai quitté l'Egypte, l'Egypte ne m'a jamais quitté. Quelquefois je pense que c'est seulement mon ombre qui est partie,alors que moi je suis resté là-bas, seul, errant, comme durant ma jeunesse."
Tous les déracinés pensent un peu la même chose.

J'ai en tête la photo de ce magnifique palace au bord du Nil, 
"L'old Cataract" Palace construit dans une Egypte alors britannique, les riches clients pouvaient et peuvent encore voir les felouques glisser sur le Nil. Si je ne me trompe pas, c'est dans cet hôtel que F.Mitterrand a vécu son dernier Noël.
Agatha Christie a écrit "Mort sur le Nil." en s'inspirant de cet endroit.




Je regrette vraiment de ne pas avoir connu ce pays.

Si vous aimez l'histoire, les histoires d'amour originales, apprendre en lisant un roman d'aventure, lisez ce livre, il devrait vous plaire.

Bye MClaire.








mercredi 30 novembre 2016






J'avais lu, il y a déjà quelques années, un de ses livres "Le testament français", c'est normal, il avait eu le Goncourt des lycéens, il  avait eu aussi le Goncourt, fait très rare et peut être unique, il faudrait que je vérifie. Si ce livre, après tout ce temps a laissé une trace dans ma mémoire, c'est qu'il était formidable. Je n'ai pas été déçue en lisant avec passion "L'archipel d'une autre vie."
Je l'ai lu presque d'une traite, laissant quelques pages pour le lendemain, j'ai eu raison, j'ai vraiment savouré ces dernières pages émouvantes, quelle écriture !

Je le lisais tellement concentrée, qu'en parcourant les lignes qui suivent, j'avais l'impression que l'homme était là, dans mon salon ou dans le saloon, le début du livre me faisait penser à un western :
"Il se dressa au-dessus de moi et je le vis, à la ceinture, un long poignard dans un fourreau de cuir. Sans un mot, il approcha sa torche de ma tête. Croyant qu'il allait me brûler les yeux, je plissai fortement les paupières. Il toussota, l'air de se dire : c'est bien ce que je pensais."

L'histoire se passe au début des années 1950, dans une Russie communiste vieillissante, Staline est encore là, le goulag aussi. La guerre de Corée fait rage, il y a la menace d'une guerre nucléaire. Le personnage principal du livre Pavel Gartsev doit réintégrer l'armée en tant que réserviste pour des manoeuvres aux confins de l'Extrême Orient russe, le Pacifique est tout près, pas le Pacifique des côtes du Mexique, là l'océan est glacé, inquiétant, inhospitalier.
Au cours de ces manoeuvres, les supérieurs donnent l'ordre à cinq hommes, dont Pavel, de partir à la chasse d'un fuyard, un évadé du goulag, ils sont dans la taïga, un terrain inconnu, dangereux, le fuyard lui connaît tous les pièges, il ne se laissera pas capturer aussi facilement, il est agile, il sait se nourrir de ce que la forêt offre, lutter contre le froid.
On ne marche pas dans la taîga, on doit s'y mouvoir avec la souplesse d'un nageur. Ils doivent absolument ramener le fugitif vivant.
Les accidents seront inévitables, les petits chefs sont plutôt froussards et ne pensent qu'à leur retour auréolés de gloire. Pavel est celui qui sera désigné pour capturer le fugitif, sinon ce sera le goulag et la mort. Il terminera cette chasse à l'homme seul, les autres sont blessés.
La véritable identité du fuyard changera complètement la donne, la vie de Pavel en sera bouleversée.
Aura t-il encore l'envie de capturer ce drôle de personnage qui finalement lui sauvera la vie.

Nous retrouverons dans le récit, l'enfant devenu homme qui avait suivi Pavel dans la taïga au début du roman. Ce sont les plus belles pages. Nous découvrirons ces îles des Chantars, là où elle avait dit "Nous allons y vivre.", peu de mots chargés de tant de sens. Un phénomène se produit sur ses îles, la 


boussole perd le nord, elle s'affole;


J'ai aimé la description de la nature et des hommes qui complètement privés de repères dans un milieu hostile, réagissent chacun à leur façon. 
Celui qui se sacrifiera pour un ami, d'autres cruels, ambitieux, l'auteur explore tous les tréfonds de l'âme humaine, ce n'est pas toujours beau. L'homme est quelquefois bestial.
J'ai aimé cette histoire d'amour, un amour infini qui se vivra qu'à deux sur une île déserte, cette île sera saccagée à cause de la cupidité d'hommes d'affaires, faire accoster des paquebots de croisière. Cela ne vous rappelle pas Venise qui meurt chaque jour sous l'oeil des milliers de touristes qui déferlent sur ses quais. ?

Nous savons que l'homme n'a pas besoin de grand chose pour vivre, mais nous faisons semblant de l'ignorer, consommer toujours consommer, le roman nous prouvera le contraire, l'auteur décrira tous les petits gestes, les trucs à connaître pour survivre et puis vivre tout simplement.
Nous pouvons entrevoir un monde où les hommes seraient enfin réconciliés, un monde où il n'y aurait plus ni des vainqueurs, ni des vaincus.
Ce livre ressemble à une fable, et les enfants adorent les fables, nous redevenons tous des enfants lorsque nous lisons, prêts à croire qu'un monde meilleur pourrait exister.

"Nous descendrons sur la berge et, sans avoir besoin de nous mettre d'accord, ramassons des branchages, allumons trois feux face à l'île Bélitchy."

En lisant ce livre vous comprendrez pourquoi trois feux.

L'auteur est épris de liberté, nous le ressentons tout au long de ce livre magnifique. L'adolescent du livre est l'auteur, toujours passionné par son pays qu'il a fui, il dit :
"La Russie peut être cruelle, atroce.....elle n'est jamais petite." 
Le sujet de "C'est dans l'air" ce soir "Poutine, le maître du monde." A méditer. 

Bye MClaire.

jeudi 24 novembre 2016


Le club de scrabble est souvent l'endroit où nous échangeons des livres. Nanou avait "La grand-mère de Jade." à prêter, je l'ai pris, il me semblait que ce livre devait être léger, facile à lire mais certainement un peu mièvre, je me trompais lourdement, c'est un merveilleux bouquin qui peut nous faire réfléchir sur différents sujets, la famille, la lecture, les écrivains, l'amour à tous les âges, sur certaines choses de la vie. Je me suis régalée en le lisant, la fin est un peu surprenante.

L'histoire :

Mamoune c'est Jeanne, la grand-mère de Jade, Mamoune a trois filles et un fils qui est parti vivre en Polynésie, Jean son mari est mort, elle vit seule. A la suite d'un malaise, une de ces filles qui est médecin décide de la placer en maison de retraite, sans lui demander son avis. Dans une de ces horribles maisons que nous appelions hospices autrefois et que nous renommons pompeusement résidences pour le troisième âge. 
Jade sa petite fille ne supporte pas l'idée de voir sa grand-mère dans cet endroit où évidemment il n'y a que des vieux. Elle décide d'enlever Mamoune et de l'amener à Paris dans son appartement où elle vit seule depuis sa séparation avec Julien, son ancien compagnon. Jade est journaliste free-lance, elle pourra s'occuper d'elle tout en gardant une certaine liberté.
Mamoune a quatre-vingt ans, Jade a trente ans.
Jade a écrit un roman, mais les éditeurs refusent de le publier pour différentes raisons, immense déception pour cette jeune femme qui adore écrire, Jeanne le lira et lui dira ce qui ne va pas dans l'écriture.

Suit un récit à deux voix.
L'essentiel de leurs conversations reposent sur la littérature, les écrivains, Jeanne avait bien caché à sa famille qu'elle était folle de lecture depuis toujours. Elle est issue d'une famille savoyarde, paysanne, lire était considéré comme perdre son temps.
Jade découvre une grand-mère surprenante, une vraie lectrice, très avertie, qui assouvissait sa passion en se faisant prêter des livres par une connaissance et qui lisait pendant ses escapades en montagne, à l'abri des regards.
L'image de Jeanne aux yeux de sa petite-fille est complètement bouleversée, elle qui a passé toutes ses vacances dans la maison de Jeanne, n'avait jamais soupçonné cette partie cachée de sa vie. Jeanne avait donc sa part de mystère.
Mais Jeanne lui réservera d'autres surprises. Quant à Jade, elle fera une très belle rencontre dans ce roman.
Je vous laisse découvrir la suite.

Ce que j'ai aimé :

Inévitablement lorsque nous aimons lire, nous nous posons des questions tout au long du livre.
J'ai toujours pensé que l'école nous avait fait découvrir les grands écrivains trop tôt, nous avons lu Stendhal, Balzac, Victor Hugo, mais il en reste quoi ? Madame Bovary, Julien Sorel, Madame de Rénal etc. Ces noms sont familiers à nos oreilles mais l'écrivain ? Et pourtant je suis certaine que les mots n'auraient pas le même sens aujourd'hui.
Nous pourrions les relire mais personnellement je n'ai pas envie, je suis passée par d'autres périodes de lecture, des écrivains plus contemporains. J'ai pourtant eu pendant quelques années des livres que je recevais tous les mois, reliés, des grands auteurs classiques, ça se faisait dans ma jeunesse, je ne devais pas tous les lire.
J'ai redécouvert dans ce livre Robert Musil et "L'homme sans qualités" J'avais complètement oublié cet écrivain, je suis allée sur internet pour lire ce qui était écrit sur cet auteur. 
Une citation qui pourrait être écrite aujourd'hui :
"En tant que personne supra-personnelle, l'État adopte carrément le principe que l'on peut piller, massacrer et tromper s'il en résulte puissance, gloire et civilisation."

Je me suis souvent reconnue dans ce bouquin, chaque lectrice se reconnaîtra dans une réflexion faite. Lire en cachette des bouquins cachés par ma mère parce qu'elle jugeait qu'ils étaient trop osés pour moi, je les trouvais;
Lire le matin, toujours en cachette, les fainéantes lisaient le matin.
Me plonger avec délice dans les romans-photos de l'époque, les amours contrariés, les héroïnes qui osaient tout.
L'éblouissement de la lecture.
La tendresse que nous éprouvons pour nos petits-enfants. Les beaux souvenirs de nos vacances avec eux.

Il y a aussi l'amour qui peut arriver à tout âge lorsqu'on a perdu son compagnon et que l'on pense sa vie finie. Il y a un très beau passage sur le veuvage, le vide, la difficulté de refaire des gestes quotidiens et la renaissance. Albert qui est veuf fera découvrir à Jeanne la mer et le bonheur de refaire des choses à quatre mains, la cuisine par exemple. Une grande pudeur dans ces relations.
Albert est éditeur et il explique à Jeanne "Que la plupart des lecteurs de romans sont des lectrices et je crois moi que si les femmes lisent tant, c'est parce qu'elles peuvent entendre ce qui n'est pas dit et qu'elles n'ont jamais peur que les sentiments laissent sur elles ces traces qui existent déjà dans leur coeur..."
La passion de Jade pour Rajiv rencontré dans le métro est aussi présente dans ce bouquin.. L'amour auquel elle ne croyait plus.

Ce livre a été publié en 2009 en poche, vous devez pouvoir le trouver chez votre libraire ou sur internet. Je vous le recommande, il est tout simplement délicieux, un bonbon que nous n'avons pas envie de finir.
Frédérique Deghelt a aussi écrit d'autres romans, entre autres "La vie d'une autre." et  Libertango qui a obtenu le grand prix de la ville de Vannes.

"'L 'école m'avait appris à lire, celle de la lecture allait m'apprendre à vivre"

Bye MClaire.







dimanche 13 novembre 2016

"Désorientale" de Négar Djavadi.


Je l'ai terminé aujourd'hui et je n'avais pas envie de le refermer.
Je vais user des superlatifs, roman foisonnant, passionnant, émouvant, bouleversant, on ne peut pas l'oublier.
C'est le premier livre de l'auteure, une vraie réussite, à lire avec attention, les personnages sont nombreux et les noms et prénoms pas du tout habituels pour nous. L'arrière grand-père s'appelle Montazemolmolk, il possède un grand domaine en Iran, une soixantaine de chambres et cinquante deux épouses qu'il honore à tour de rôle, il a aussi vingt-huit enfants. Ils vivent tous dans "l'andanouri" en 1896. Lui était le Khan, le maître absolu.

C'est le début du roman. Nous sommes très vite transportés dans une salle d'attente de l'hôpital Cochin, KImiâ l'héroïne du bouquin veut un enfant par insémination artificielle, Pierre le donneur qui est sensé être son compagnon est séropositif.
Elle est à Paris depuis l'âge de 10 ans, ses parents, une famille aisée sont des opposants au régime du Shah puis de celui de Khomeiny, qui est répressif : "Qui aurait pu imaginer que l'ange n'était en fait qu'un démon, la lumière une illusion ? Qui aurait pu savoir que tel le joueur de flûte de Hamelin, le vieillard conduirait bientôt les enfants de son pays dans une grotte et les y enfermerait ?"

 ils ont été obligés de fuir l'Iran, le père Darius Sadr est parti le premier, sa femme et leurs trois filles suivront, des passeurs se chargeront de leur faire traverser la frontière, des Kurdes en chevaux dans la neige, moments difficiles qui marqueront la mère et les enfants, puis la Turquie et enfin la France, tant attendue, tant aimée dans leurs rêves de liberté.
Ils vivront à Paris et à partir de là le roman nous transportera de Paris en Iran, entre le passé et le présent. Il n'y a pas d'ordre chronologique, mais on ne se perd jamais.

J'ai aimé :

J'ai toujours été touchée par les exilés, qui n'a pas subi l'exil ne peut pas comprendre.

J'ai aimé sentir tous les parfums d'Orient, voir vivre ces familles fusionnelles dans les pays orientaux, les jalousies, les disputes, l'amour, les codes qui régissent les uns et les autres, les conservateurs et ceux qui sous le régime du Shah s'émancipaient. Les intellectuels qui se battent contre toutes les dictatures. 
J'ai compris le désenchantement de cette famille qui arrivait dans un pays tant désiré, pensant y trouver de la compréhension, de l'attention et ne trouvant que de l'indifférence et même un peu d'agressivité. Darius le père si brillant, si admiré par sa femme, homme imprévisible, conquérant perd tout son éclat dans ce petit appartement, loin de l'Iran il n'est plus rien, alors il marche pendant des heures et il écrit.
Paris est gris, Paris est beau pour ceux qui peuvent profiter de ce que cette ville offre. Nous sommes arrivés en 1962 dans une ville que nous ne connaissions pas et l'hiver 1963 avait été terrible, j'ai des souvenirs. J'ai compris.
La famille Sadr navigue entre l'appartement, le supermarché, l'école. Léili la fille aînée et Mina la cadette, sont des enfants sages, Kimiâ la narratrice traîne un mal de vivre, elle se rebelle, fréquente des milieux "underground", les Halles, les punks. Le désarroi de la mère, Sara, un personnage infiniment émouvant, à mon avis le plus beau personnage du roman.
L'errance de Kimiä qui cherche à se débarrasser de cette famille qui lui colle à la peau et qui l'empêche d'être elle même, mal dans ce corps qui ne lui convient pas. 
« Je suis devenue, comme sans doute tous ceux qui ont quitté leur pays, une autre. Un être qui s’est traduit dans d’autres codes culturels. D’abord pour survivre, puis pour dépasser la survie et se forger un avenir. »
Kimiâ apaisée, Kimiä qui va être maman, rend visite à sa mère, Sara, dans une résidence, une maison de retraite, un passage qui ne peut pas laisser insensible :
"La décoration de la chambre est chargée. Partout des photos, des objets familiers, des livres, des coussins, un tapis persan couvre le sol. C'est nous qui les avons apportés, dans le but dérisoire de rendre ce lieu chaleureux et de lutter contre l'immense culpabilité qui nous habite depuis que nous l'avons installée ici. Il y a en chacune de nous ce conflit insondable entre la raison et la culture, le fait que nos vies ne nous permettent pas de la garder avec nous et l'honneur persan qui consiste à ne pas abandonner ses parents, quel que soit son état. Sara n'a besoin d'aucun de ses objets. Elle évolue dans une capsule spatio-temporelle où le souvenir n'existe pas."...Elle me regarde. De peur qu'elle me confonde avec quelqu'un d'autre je la devance : "C'est moi Kimiâ."
"Ton père n'est toujours pas rentré, je ne sais où il est. On est vendredi n'est-ce pas ?"
Darius a été assassiné par les amis du régime iranien.
Kimiâ, ne partagera jamais avec Sara sa joie d'être maman. Sara est dans son monde.

Ce livre n'est pas complètement autobiographique, une partie seulement, la première.

A vous de le lire. La lecture est subjective, je me méfie, depuis que j'ai prêté "Une vie française" de J.Paul Dubois que j'avais tant aimé à deux lectrices de mon club et qui m'ont dit en me le rendant "Nous n'avons pas du tout aimé."
Incompréhension de ma part, mais elles avaient le droit de ne pas aimer.

Bye MClaire.








dimanche 6 novembre 2016

"La septième fonction du langage" Laurent Binet





Gaël Faye était nommé pour le Goncourt, voir ma gazette précédente, il ne l'a pas eu, je m'en doutais et je suis presque heureuse pour lui, c'était trop tôt, il est jeune, le Goncourt peut bloquer un écrivain, il n'ose plus écrire, la peur de ne jamais être aussi bon dans l'écriture. Il aura sans doute le Goncourt des lycéens, à voir.

Laurent Binet avait obtenu le prix Interallié en 2015 pour "La septième fonction du langage."
L'auteur présentait son livre au Salon du Livre à Vannes, j'étais assise à trois mètres de lui, je le regardais autant que je l'écoutais, il est d'une beauté renversante, des beaux yeux verts, je crois, jeune, fougueux, très bavard, captivant, sympathique. Il est agrégé de lettres.
Ce grand bavard devait jubiler en écrivant son bouquin, il a même écrit quelques pages de trop à mon avis dans la deuxième partie, je l'avoue, j'ai sauté des pages, elles n'étaient pas indispensables à la compréhension du livre.

"Pourquoi les étudiants auraient-ils besoin de professeurs, si tout s’apprenait dans les livres ? Pourquoi ont-ils besoin qu’on leur explique ce qui est écrit dans les livres ? Pourquoi y a-t-il des écoles et pas juste des bibliothèques ? C’est que l’écrit seul jamais ne suffit. Toute pensée est vivante à condition qu’elle s’échange, elle n’est pas figée ou bien elle est morte."

Je confirme, il sait expliquer. 

L'histoire du livre :

C'est un polar mais un polar particulier, sorti tout droit de l'imagination de l'auteur, mais avec des personnages qui existent encore ou disparus;
Roland Barthes, sémiologue célèbre, se fait renverser par une camionnette après avoir déjeuné avec F.Mitterrand, nous sommes le 25 février 1980, il mourra quelques jours plus tard. Un fait réel. Est-ce un accident ou un attentat ? L.Binet a décidé dans son roman que c'était un attentat.

Définition de la sémiologie
Science qui étudie les systèmes de communication par signes entre les individus - Synonyme : sémiotique.

Roland Barhes (prononcer Barthes et pas "Barthés" comme N.Sarkozy !) aurait été ou serait en possession d'un document capital "La septième fonction du langage" écrit par Roman Jackobson. Celui qui détiendra la formule aura le monde à ses pieds, il saura convaincre tous ses interlocuteurs, maîtrisera parfaitement le langage. Les dictateurs de la planète sont évidemment intéressés.
Tous se mettent en quête de ce document.
Il y a des Bulgares, des Japonais, Giscard qui était au pouvoir et qui voudrait le garder, Umberto Eco, P.Sollers vit avec Kristeva une Bulgare pas étrangère à la mort de Barhes, attention toujours dans le roman, Foucault qui fréquente beaucoup les saunas gays sordides, Althuser philosophe et membre du P.C, il étranglera sa femme Héléne, là ce n'est pas du roman, c'est vrai. BHL dissimulé dans une chemise noire.
Le voyage à Bologne à la rencontre d'Umberto Eco.

Vous avez compris, Laurent Binet flirte beaucoup avec la réalité et la fiction, Philippe Sollers était d'ailleurs furieux, ce jeune écrivain est vraiment irrévérencieux, j'ai beaucoup ri en lisant la scène du repas chez Sollers. Parfaitement caricaturé.

Le couple que forme le flic J.Bayard et Simon Herzog, jeune intello repéré à la fac de Vincennes est savoureux. Simon sera l'interprète de Bayard qui ne comprend rien à la sémiologie, j'avoue il a aussi été le mien, le monde de la sémiologie m'est parfaitement étranger.

La magie de ce roman est que même si nous ne maîtrisons pas parfaitement, et quelquefois pas du tout, le langage fumeux des philosophes, nous lisons avec intérêt les pages où ils apparaissent. 
J'ai beaucoup aimé les pages où il décrit les politiques, les conversations inventées mais qui pourraient être vraies. La description de J.Lang jeune, grand ami de Foucault.
C'est aussi pour ma génération un retour aux années 80, Poniatowski apparaît comme un grand buveur de whisky, D'Ornano que nous avons oublié. 

On ne peut sortir de ce livre qu'un peu plus érudit et conscient de la force du langage, du pouvoir des mots.
.
J'ai aimé ce roman, intelligent et drôle..

Bye MClaire.









vendredi 28 octobre 2016

"Petit pays" Gaël Faye.



Passer du rap au statut d'écrivain, bravo, voir son premier livre dans les quatre retenus pour le Goncourt, bravo.
Un roman réussi, personnellement je ne suis pas certaine qu'il mérite le Goncourt, prix prestigieux mais que je lis rarement, là je me suis régalée, le Goncourt ne me procure pas autant de plaisir, qu'il ait le Goncourt des lycéens, oui, il le mérite, j'aime ce Goncourt attribué par des jeunes et pas par les membres d'une Académie qui se consultent avant la proclamation, je crois qu'ils récompensent plus l'éditeur que l'écrivain. C'est mon avis.

L'histoire :
Ce livre commence tout en douceur, l'Afrique, le Burundi et en face le Rwanda, des enfants qui habitent une impasse où la vie se déroule tranquillement, les jeux, les odeurs, le parfum de la citronnelle, l'école, les copains, les quatre cents coups, ils volent les mangues à l'aide d'une perche, les revendent à une vieille dame grecque chez qui elles ont été volées. La vie de tous les enfants heureux qui ignorent la barbarie. 
Peu à peu l'ambiance devient plus pesante, les parents de Gabriel se séparent, lui est blanc, elle est tutsie, la mère s'en va en laissant ses deux enfants à leur père.

Les chuchotements entre les "grands" commencent à intriguer les enfants, il se passe quoi ? Pour le première fois le peuple vote pour élire son Président, des bruits circulent, si le Président n'est pas élu il arrivera le pire. C'est ce qui arrive, il n'est pas élu. La barbarie se mettra en marche, les hommes deviendront fous.
L'innocence des enfants disparaîtra, ils parleront de guerre, de l'achat d'armes, formeront un gang, mais Gabriel s'éloignera de ses amis, il se réfugiera dans la lecture, Madame Economopoulos dispose d'une bibliothèque fournie Gabriel se goinfrera de lecture "Avec Mme Economopoulos, nous nous asseyions dans son jardin sous un jacaranda mimosa. Sur la table en fer forgé, elle servait le thé et des biscuits chauds. Nous discutions pendant des heures des livres qu'elle  mettait entre mes mains......Je ramassais des feuilles séchées au pied des arbres pour en faire des marque-pages."
Après ces moments de douceur surgira l'horreur.
"Le génocide est une marée noire, ceux qui ne s'y sont pas noyés sont mazoutés à vie."
Les massacres, une guerre totale entre Hutus et Tutsis au Rwanda qui contaminera le Burundi.
Plus d'enfance et il faudra abandonner le paradis de leurs jeunes années.
La dernière partie du livre est vraiment bouleversante.
Nos gouvernants étaient ils coupables ? Nous pouvons nous poser des questions, la France est très impliquée en Afrique.

J'ai tout aimé en lisant ce livre, j'ai compris le désespoir de cet enfant lorsqu'il a fallu partir de ce pays, le Burundi, j'ai ressenti exactement la même chose lorsque nous sommes partis d'Algérie, je ne me souviens pas si nous avons donné un tour de clé à la porte ou si elle est restée ouverte, nous sommes partis très tôt, une fuite, nous n'étions pas des enfants mais nous étions tellement jeunes avec un bébé dans les bras.
Je comprends toujours tous les exilés du monde.
Est-ce que "Petit pays" est un roman autobiographique ? Il paraît que non. C'est un livre lumineux et noir à a fois, un grand roman. Une question :
"Comment fait-on pour vivre après, pour se reconstruire ?"

Bye MClaire.




vendredi 21 octobre 2016

"Berezina" Sylvain Tesson


Sylvain Tesson est un écrivain-voyageur ou le contraire.
Vous le connaissez, il passe quelquefois à la télé, la dernière fois que nous l'avons vu il était très mal en point, le visage partiellement paralysé, lunettes noires. Lui qui a parcouru une partie du globe, tenu des paris insensés dans des conditions extrêmes, est tout simplement tombé en escaladant la maison d'un ami à Chamonix, dix mètres de chute, des jours de coma.
Il est le fils du journaliste Philippe Tesson, je lis souvent le qualificatif de bobo en ce qui le concerne, un aventurier-bobo, je ne crois pas, mais on n'échappe pas à son éducation.
J'ai toujours aimé lire les bouquins qui racontaient des expéditions, des aventures, des marches à travers un pays, ou le tour du monde en vélo, il faut avoir le courage de tout quitter pour vivre ses rêves, j'admire.

L'histoire de cette aventure en side-car ou sidecar pour les scrabbleurs :

Sylvain Tesson et ses compagnons décident de parcourir en hiver 4.000 km à travers la Russie jusqu'à Paris, en side-car, un Oural,  rendez-vous est donné au pied de la statue de Napoléon aux Invalides. Ils décident de refaire le chemin qu'a parcouru l'armée impériale après la débâcle en Russie, les hommes et les chevaux, des milliers de morts sur ce chemin, et l'Empereur en tête qui finalement laissera ses troupes continuer seules, lui rejoindra Paris plus vite en compagnie de Caulaincourt, le grand écuyer, qui plus tard écrira sa Berezina pour les générations futures .
Personnellement, j'ai trouvé ce livre remarquable, mêler l'Histoire et sa propre histoire, une très bonne idée.
Nous avons tous appris dans les livres d'histoire la vie de Napoléon, mais les détails n'y étaient pas. Nous redécouvrons le courageux Maréchal Ney, les horreurs de cette campagne, ces hommes oubliés par l'histoire qui suivaient l'Empereur sans se poser de question, il fallait survivre à n'importe quel prix, marcher et encore marcher jusqu'à Vilnius où ils pensaient enfin manger, mais "les bourgeois, voyant arriver ces torrents de possédés couverts de peaux de bêtes, firent ce que font les bourgeois quand ils sont menacés : ils fermèrent les portes de la ville." (rien ne change.) "La marée de zombies se fracassa contre les remparts."
La famine, les poux, le typhus, la fatigue, l'épuisement, auront raison de ces hommes.

Tout au long du livre, l'auteur se pose des questions sur la notion d'honneur, l'amour de la Patrie, un mot bien démodé, sur l'individualisme de notre époque.
J'ai beaucoup aimé les dernières pages, je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle avec notre époque actuelle. Napoléon faisait rêver "Les hommes sont prêts à tout pour peu qu'on les exalte et que le conteur ait du talent."
Avec lui tout était possible, vous étiez charcutier, vous pouviez finir maréchal. "Il n'était plus nécessaire d'être bien né, il suffisait d'être ardent."

Qui nous fait rêver actuellement ? Je cherche.

"Qui était Napoléon ? Un rêveur éveillé qui avait cru que la vie ne suffisait pas. Qu'était l'Histoire ? Un rêve effacé, d'aucune utilité pour notre présent trop petit."
Un vrai communicant. Il utilisait toutes les techniques de la publicité actuelle.

Qui est véritablement Sylvain Tesson ? Un homme que la Russie fascine, qui veut vivre pleinement sa vie et mourir de mort violente plutôt que finir sans passion.

J'ai beaucoup aimé mettre virtuellement mes pieds dans ces paysages glacés traversés par des hommes un peu exaltés, excentriques, aimant beaucoup la vodka, sans une seconde d'ennui. "En Russie, l'art du toast a permis de s'épargner la psychanalyse. Quand on peut vider son sac en public, on n'a pas besoin de consulter un freudien mutique, allongé sur un divan."

Un dernier passage :
"On ne manquait pas de communicants, nous autres; Mais ils ne nous parlaient pas la même langue. Il ne s'agissait plus de conquérir l'Orient en chargeant à cheval. En guise d'horizon, on nous dessinait des machines à café automatiques et des écrans plats. L'objectif n'était pas la gloire, mais le droit à un pavillon recevant la 5G. D'ailleurs "héros", c'était le nom que la presse donnait aujourd'hui aux pères et aux mères de famille."

J'ai acheté ce livre neuf chez Easy-cash, 3 euros 49, pourquoi 49 ? Je ne sais pas.
Je pense avoir lu qu'il était publié en poche.

Bye MClaire.